Maximiser vos offres : Florence, le biais de l’optimisme et le JTBD

“Avant d’investir dans du marketing, avez-vous validé les ‘jobs’ de vos clients ?”

Dans la plupart des entreprises, une offre qui ne décolle pas appelle des réponses classiques : revoir le message, relancer des campagnes, faire appel à une agence, parfois même embaucher un nouveau Head of Growth. Pourtant, avant d’appuyer sur l’accélérateur marketing, une question clé reste souvent sans réponse : cette offre répond-elle réellement à un job non satisfait chez vos clients ?

C’est là qu’intervient la méthode Jobs To Be Done (JTBD) — non pas pour inventer une nouvelle offre, mais pour maximiser le potentiel d’une offre existante. Ce que nous allons illustrer à travers une étude de cas concrète : Florence.

1. Florence, ou l’aveuglement par excès d’optimisme

Florence est une startup de la HealthTech. Elle propose une plateforme qui met en relation des établissements de santé (hôpitaux, EHPAD, cliniques) avec des soignants disponibles en freelance. L’idée est simple : réduire les tensions liées aux absences ou aux pics d’activité en permettant des remplacements rapides et qualifiés.

Le produit est fonctionnel, l’UX solide, et le marché semble prêt. Pourtant, la croissance reste molle.

L’explication de l’équipe produit :

“Les établissements sont mal organisés, ils ne comprennent pas encore notre valeur. Il faut simplement évangéliser davantage.”

Le plan d’action initial :

Lancer une campagne de notoriété, embaucher un SDR, faire du contenu pour “expliquer l’intérêt de la plateforme”.

Et pourtant… ces actions restent sans impact majeur.

2. Le biais de l’optimisme

Ce que Florence vit est courant dans les startups : un biais cognitif puissant, celui de l’optimisme projeté.

“Notre produit est génial, donc si les clients ne l’achètent pas, c’est qu’ils ne comprennent pas.”

Ce biais pousse les équipes à penser que le problème vient du client, pas de l’offre. Le danger ? Investir dans du marketing et des efforts commerciaux qui ne changeront rien à l’essentiel : le produit ne répond pas au bon job, au bon moment, pour le bon profil.

3. L’intervention JTBD : et si on parlait aux vrais utilisateurs ?

L’équipe décide alors de mener une série d’entretiens Jobs To Be Done, auprès de 15 établissements qui :

Objectif : comprendre la logique réelle de décision côté client.

Ces interviews sont structurées non pas comme des retours d’expérience, mais comme des récits de transition. Chaque entretien suit le déroulé :

4. Résultats des interviews : une autre réalité client

Les insights des entretiens bouleversent les hypothèses initiales. Voici ce qui émerge.

Insight 1 : le vrai “job” n’est pas de “trouver un remplaçant”

Les établissements ne cherchent pas juste un soignant en urgence. Leur vrai job est :

Pouvoir assurer la continuité de soins sans créer de conflit avec l’équipe en place.

En clair, ils veulent éviter les tensions internes (personnel qui se sent court-circuité, intérimaires perçus comme moins engagés, etc.). Ce job est émotionnel autant que fonctionnel.

Insight 2 : peur du jugement et de la désorganisation

Certains directeurs d’établissement ont peur d’admettre qu’ils manquent de personnel ou qu’ils recourent à des freelances. Cela entre en conflit avec leur image de “bonne gestion RH”. Ils ont besoin d’une solution qui préserve leur légitimité.

Insight 3 : mauvaise synchronisation avec les pics de charge

Le moment où ils ont besoin de renforts est très court. Si le produit n’est pas maîtrisé ou déjà intégré en amont, ils ne prendront pas le risque de l’utiliser en urgence.

5. Changer l’angle de promotion grâce au JTBD

Ces insights ont conduit Florence à repositionner son offre et sa communication. Voici comment :

Nouveau message

Avant :

“Trouvez rapidement un soignant qualifié pour combler vos absences.”

Après :

“Préservez la qualité de soins sans désorganiser vos équipes. Créez un vivier de remplaçants que vous connaissez à l’avance.”

Nouvelle segmentation

Florence a cessé de viser tous les établissements. Elle s’est concentrée sur ceux qui :

Nouvelles fonctionnalités mises en avant

6. Résultats de l’approche JTBD

En moins de 6 mois :

Mais surtout, l’équipe produit a repris confiance, car elle savait désormais qu’elle ne travaillait pas “à l’aveugle”, mais avec une boussole claire : les jobs à accomplir de ses utilisateurs.

7. Méthode JTBD appliquée à votre offre existante

Voici comment vous pouvez reproduire cette démarche :

Étape 1 – Identifier les segments utilisateurs qui n’activent pas ou churnent

Ne ciblez pas les fans de votre produit. Allez chercher ceux qui sont passés… mais sont repartis.

Étape 2 – Mener des interviews JTBD structurées

Utilisez un script centré sur :

Étape 3 – Cartographier les “jobs” dominants

Repérez les éléments fonctionnels, émotionnels et sociaux. Exemples :

Étape 4 – Réaligner votre offre autour de ces jobs

Revoyez vos messages, vos tunnels d’activation, votre pricing ou vos canaux d’acquisition à la lumière des insights.

Conclusion

Ce que montre l’exemple de Florence, c’est que le problème ne vient pas toujours du produit… mais de la compréhension du job qu’il est censé accomplir. Avant de réinvestir dans du marketing ou de refaire votre onboarding, prenez le temps de (re)découvrir ce que vos clients essaient réellement de résoudre.

La méthode JTBD n’est pas un outil de plus. C’est un changement de posture : écouter vos utilisateurs non pas pour qu’ils valident vos idées, mais pour qu’ils vous révèlent ce qu’ils essaient de changer dans leur vie professionnelle.

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