Fidéliser vos clients à l’ère de l’abonnement : le cas de Marc

“Un client fidèle ne l’est pas par attachement, mais par valeur perçue dans son ‘job’ quotidien.”

Introduction : un modèle économique qui exige plus que la rétention

Le modèle SaaS (Software as a Service) repose sur une logique simple en apparence : un revenu récurrent, une base de clients à entretenir, et un pipeline d’acquisition à alimenter. En réalité, la viabilité de ce modèle dépend d’une variable souvent mal comprise : la fidélisation active.

Contrairement aux produits traditionnels, un service par abonnement est en permanence renégocié dans l’esprit du client. Il ne suffit pas de vendre une fois : chaque mois, chaque usage, chaque friction est une opportunité de désabonnement.

C’est ici qu’intervient la méthode Jobs To Be Done (JTBD). Elle permet de comprendre la fidélité non pas comme une donnée affective ou contractuelle, mais comme une conséquence directe de la valeur perçue dans l’accomplissement du « Job » du client.

1. Le cas de Marc : une fidélisation qui s’érode malgré des effort

Marc est COO d’un éditeur SaaS B2B dans le domaine de la cybersécurité. Après deux années de forte croissance, la dynamique s’essouffle. Malgré un churn maîtrisé en apparence, la durée de vie moyenne des clients plafonne à 18 mois.

En interne, l’équipe marketing redouble d’efforts : nurturing, relances personnalisées, refonte des emails de renouvellement. Rien n’y fait. Les courbes de rétention stagnent.

C’est à ce moment-là que Marc découvre la logique des Jobs To Be Done. Une question, en particulier, agit comme un révélateur :

“Savez-vous quel progrès concret vos clients essaient d’accomplir chaque jour grâce à votre solution ?”

Il réalise que l’entreprise parle en termes de fonctionnalités, de roadmap, de support… mais jamais en termes de “progrès client”. Il manque une compréhension fine des usages, des motivations cachées, et surtout des moments de vérité dans le quotidien de l’utilisateur.

2. De la satisfaction à la valeur perçue dans le Job.

2.1 La fidélité n’est pas un état d’âme

Beaucoup d’entreprises interprètent la fidélité comme une forme de loyauté affective. Elles misent sur la qualité de la relation, l’image de marque, ou encore la satisfaction mesurée par des KPIs classiques (NPS, CSAT).

Mais dans un modèle d’abonnement, la fidélité est une conséquence logique de la valeur ressentie par le client dans l’usage réel, c’est-à-dire dans l’accomplissement fluide de son Job principal.

Un client ne reste pas fidèle parce qu’il aime votre marque. Il reste fidèle parce que, chaque semaine, votre service lui permet de réussir ce qu’il a besoin de réussir.

2.2 L’effet “mission critique”

Certains outils deviennent tellement ancrés dans les flux de travail qu’ils deviennent invisibles, intégrés au Job lui-même. On ne les quitte pas, non par inertie, mais parce que leur retrait créerait une rupture de continuité dans la tâche essentielle.

C’est cette position que chaque éditeur SaaS cherche à atteindre. Mais on n’y parvient pas avec une UX agréable ou des emails sympathiques. On y arrive en comprenant intimement le Job réel du client — et en structurant toute la proposition de valeur autour de lui.

3. Comment JTBD redéfinit la fidélisation ?

3.1 Reconstituer le parcours du Job

Avec l’aide d’un expert JTBD, Marc initie une série d’entretiens avec des clients fidèles… et d’autres partis récemment. Il découvre que beaucoup n’ont jamais accompli pleinement le “Job” pour lequel ils avaient acheté la solution.

Pour certains, le Job était : “identifier rapidement les failles critiques avant une réunion de comité de pilotage”.
Pour d’autres : “avoir un rapport lisible sur les risques IT pour rassurer un client stratégique”.

Or, ni les dashboards ni les formats d’export n’étaient alignés avec ces besoins concrets.

Résultat : les utilisateurs bricolaient avec Excel, ou s’équipaient d’un second outil pour contourner la frustration.

3.2 Identifier les moments d’attrition

Un point essentiel de l’approche JTBD est l’identification des moments d’attrition silencieuse — ces étapes où la promesse perçue ne rencontre plus l’usage.

Dans le cas de Marc, les données montraient que plus de 40 % des utilisateurs actifs ne revenaient pas sur la plateforme après leur 10e session. Les interviews révèlent que ces utilisateurs avaient atteint un palier : ils avaient extrait une information utile une fois, mais n’avaient pas compris comment systématiser l’usage.

Le “Job” était partiellement accompli… mais sans continuité. D’où l’attrition progressive.

4. Transformer la fidélisation avec une logique “Job-based”

4.1 Adapter l’onboarding au Job

Marc décide de restructurer l’onboarding non autour des “fonctionnalités clés”, mais autour des scénarios d’usage liés aux Jobs prioritaires.

→ Une séquence pour “préparer une réunion avec son DSI”
→ Une autre pour “générer un rapport d’audit IT mensuel”

Chaque parcours propose des contenus, des automatisations et des tutoriels ciblés — en parlant le langage de la situation du client, pas celui de l’outil.

4.2 Piloter le churn en fonction de la non-accomplissement du Job

Plutôt que de traquer uniquement les connexions ou l’ouverture d’emails, l’équipe Customer Success développe un indicateur maison : le Taux d’Accomplissement du Job (TAJ).

Cet indicateur mesure le nombre de fois où un utilisateur va jusqu’au bout d’un flux qui correspond à un Job central identifié.

Les clients avec un TAJ > 3 dans le premier mois ont 70 % de chances de rester au-delà d’un an.

Conclusion : fidéliser, c’est outiller un progrès récurrent

L’ère de l’abonnement impose une nouvelle lecture de la fidélité. Ce n’est plus une question de branding ou de prix, mais de continuité dans la valeur produite pour un Job donné.

Le cas de Marc montre que l’approche JTBD n’est pas une technique UX, mais un levier stratégique. Elle permet de concevoir, mesurer et améliorer la fidélité en partant du seul point de vue qui compte vraiment : celui du client en train d’essayer de réussir quelque chose.

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